Il y a un an, Ulysse Verdenne, 23 ans, a perdu son père, Pascal, abattu par Cherif Chekatt à la terrasse d’un restaurant à Strasbourg. Le jeune homme participera ce mercredi 11 décembre 2019 aux commémorations anniversaires de l’attentat, partagé entre douleur et acceptation.
Du 11 décembre 2018, Ulysse Verdenne, n’a rien oublié. Au soir de l’attaque perpétrée par Cherif Chekatt, le Strasbourgeois était à Dijon. C’est l’un de ses deux frères, Victor, qui lui a appris la terrible nouvelle par téléphone, avant qu’il ne doive, à son tour, prévenir sa mère. "C’était extrêmement difficile", se souvient-il.
Leur père et ex-mari, Pascal, venait d’être abattu à la terrasse d’un restaurant où il buvait un verre avec sa compagne à quelques mètres du marché de Noël, au cours de l’attaque de Strasbourg.
Quelques heures plus tard, Ulysse, rejoignait la cellule d’aide aux victimes dans un état de sidération, sans vraiment réaliser le drame qui venait de se nouer. "J’étais stoïque, je ne comprenais pas. C’était une sensation bizarre. C’était une forme de déni de réalité", confie-t-il.
"L’explosion intérieure" interviendra une semaine plus tard. "Ma compagne m’a posé des questions sur ce que je ressentais. Ça m’a beaucoup aidé. C’est là que j’ai commencé à débloquer mes émotions".
Un an plus tard, le jeune homme, suivi psychologiquement, doit faire face au manque et à la douleur, ravivée en ce mois de décembre 2019. "Il y a quelques jours, je suis allé au marché de Noël de Blaesheim (Bas-Rhin). Je vous avoue que ça m’a mis un coup. Le lendemain, je n’étais pas bien". Celui de Strasbourg ? "Je n’y suis pas encore retourné. Je n’ai pas trouvé la motivation. La foule me stresse."
Au quotidien, il y a aussi les questions qui tambourinent. L’une d’elles revient souvent. Comment parlera-t-il de la mort de Pascal à ses futurs enfants ? A 23 ans, c’est le travail qui permet au jeune ouvrier du bâtiment de "se changer les idées" et de "tenir debout", toujours déchiré par un sentiment d’injustice.
"Mon père ne méritait pas ça. Il avait la forme, il avait tout, il allait être en retraite anticipée. 61 ans, et c’est fini. C’est énervant. Il était au mauvais endroit, au mauvais moment".
Ironie du sort, celui qui est décrit comme amateur de vélo, grand intellectuel, plein d’humour, était aussi passionné par l’histoire des armes. Ulysse se rappelle qu’à plusieurs reprises, il lui avait confié : "la meilleure mort que je puisse avoir, la plus rapide, c’est une mort par balle."
Aujourd’hui, le jeune homme dit n’éprouver aucune haine envers l’auteur de la tuerie, qui a fait 4 autres morts. "Il faut qu’il y ait une justice, mais je n’en veux à personne. Je n’ai pas ressenti de soulagement particulier lorsque Chekatt a été abattu. Je ne blâme pas non plus les agents de sécurité du marché de Noël. Ça ne sert à rien. J’ai perdu quelqu’un, il n’y a rien à faire", ajoute-t-il.
En ce jour d’anniversaire, Ulysse sera "debout", présent aux différents temps forts des cérémonies commémoratives, mais ne sait pas encore s’il aura la force de s’exprimer. Pour lui, le dévoilement d’un mémorial place de la République est notamment indispensable. "Il ne faut pas mettre ça de côté. Il faut regarder l’Histoire. Il y a des choses qui ne sont pas jolies dans ce monde, les gens doivent s’en souvenir", conclut-il.